L’accès au capital privé se démocratise
IL ÉTAIT UNE FOIS… VOS FINANCES. L’engouement pour le capital privé est bien réel et ne cesse de gagner en popularité. Autrefois inaccessible aux investisseurs particuliers, le secteur se démocratise de plus en plus.
Parution : 19 février 2025, Les Affaires, Charles Poulin
Photo : Unsplash, Joshua Mayo
De nombreux fonds de capital privé (private equity) voient le jour depuis quelques années. Le gouvernement fédéral a changé les règles du jeu en 2020, et les investisseurs institutionnels ne sont plus les seuls à y avoir accès.
« Avant, les seules catégories d’actifs que monsieur et madame Tout-le-Monde pouvaient acheter étaient des fonds d’actions et des obligations dans leur portefeuille, explique le planificateur financier et président de De Champlain Groupe financier, Sylvain De Champlain. Les stratégies alternatives étaient réservées aux investisseurs institutionnels, comme les grands régimes de retraite. »
Depuis un peu plus de quatre ans, l’investissement privé, les actions non cotées à la Bourse, les stratégies de fusion-acquisition, les débentures convertibles et de l’arbitrage sont désormais accessibles aux investisseurs particuliers.
Pas à n’importe quel prix, toutefois. Il faut être un investisseur accrédité, c’est-à-dire posséder notamment au moins 1 million de dollars (M $) d’actifs ou avoir obtenu un salaire de 200 000 $ annuellement deux années consécutives (300 000 $ pour un couple).
« C’est normal, car l’investisseur doit avoir une très forte tolérance au risque et un bilan très solide et comprendre ce dont il en retourne, puisque ce sont des produits souvent vendus sans prospectus », précise Sylvain De Champlain.
Intérêt grandissant
Le PDG de Sagard Private Equity Solutions, Jonathan Tétrault, mentionne que sur les 11 000 milliards de dollars (G $) d’actifs dans le capital privé sur la planète, 10 % sont désormais dans les mains d’investisseurs accrédités.
En lançant son tout nouveau fonds, le Sagard Private Equity Strategies LP, la société table sur l’intérêt grandissant quant aux fonds à capital privé.
Qu’est-ce qui les rend si populaires ? Le rendement.
« Les données nous montrent qu’historiquement, on peut aller chercher de 200 à 300 points de base de performance de plus en visant les entreprises de taille moyenne (BAIIA entre 15 M $ et 200 M $), explique-t-il. Si on regarde les marchés privés, on fait mieux que les marchés publics sur des horizons de 10, 15 et 20 ans. »
D’ailleurs, Sagard cible un rendement qui se situe entre 14 % et 18 % annuellement pour son nouveau produit, qui investira essentiellement dans des entreprises nord-américaines.
« Les gens ne le réalisent pas, mais il y a sept fois plus d’entreprises privées avec 100 M $ de revenus et plus annuellement que d’entreprises publiques, indique Jonathan Tétrault. Il y a un univers immense d’entreprises qui sont très intéressantes pour les investisseurs parce qu’elles sont relativement petites. Lorsqu’elles travaillent avec des fonds de capital privé, c’est plus facile d’accélérer leur croissance. Parce qu’elles sont plus petites, il y a habituellement plus de potentiel d’optimisation de la performance. »
Démocratisation
Sagard propose aux investisseurs d’accéder à son fonds avec une mise initiale minimale de 25 000 $. Par la suite, ils peuvent continuer à investir avec des montants d’aussi peu que 500 $ par mois. Le tout peut même être placé dans son REER, son CELI ou un REEE.
Sylvain De Champlain voit là une démocratisation de cette catégorie d’actif.
« C’est ce que ça me dit parce que traditionnellement, l’investissement initial pour accéder à ces stratégies devait être au minimum de 150 000 $ ou 250 000 $, rappelle-t-il. Maintenant, les conseillers qui ne parleront pas de stratégie alternative à leurs clients vont se faire damer le pion par des compétiteurs qui vont être plus allumés. »
Pour lui, c’est un complément très intéressant pour les portefeuilles d’investisseurs relativement fortunés qui permet de diminuer leur risque et qui augmente leur rendement potentiel en ajoutant une catégorie d’actif complémentaire aux actions et aux obligations.
Sagard se dit optimiste quant au succès escompté de son nouveau fonds de capital privé.
Le dirigeant confie que la réception du marché est très bonne.
« C’est difficile d’estimer les souscriptions initiales, avoue Jonathan Tétrault. Mais nous avons lancé un autre fonds en crédit privé au mois de septembre et nous sommes déjà à plus de 100 M $ aujourd’hui ».